Juifs et Arabes expérimentent la coexistence à l’école

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Une école mixte, réunissant Juifs et Arabes. Cette réalité, loin d’être isolée, demeure encore l’exception dans le système scolaire israélien. A Jaffa, l’un de ces centres témoigne de l’ouverture des enfants, souvent supérieure à celle des adultes. Dans les cours des écoles, le conflit israélo-palestinien perd souvent de son acuité, loin des journaux télévisés et des discours des adultes. Un modèle qui ne demande qu’à faire école.

Margerit et Zakya, sont assises côte à côté, presque bras dessus bras dessous. L’une est juive, l’autre arabe, mais elles partagent la même implication pour leur enfant. « Nous avons toute deux un fils dans cette école », explique Zakya.

En fait d’école, « College for all » est plutôt un programme de cours de rattrapages destinés « à des enfants d’origines sociales diverses, et souvent modestes », souligne Sarit Peckerman, directrice du programme de ce centre un peu particulier situé à Jaffa. A raison de quelques heures par semaine après les cours à l’école, les enfants y suivent un programme destiné à leur donner de « l’excellence dans chaque domaine de la vie », selon Sarit Peckerman : anglais, informatique, musique, art, littérature…

Autant dire que les parents, derrière les enfants présents ici, sont particulièrement motivés par l’avenir de leur progéniture. Le mélange d’enfants juifs et arabes y est également présenté comme un facteur d’enrichissement. 26 Juifs et 12 Arabes s’y voient quatre fois par semaine. L’enseignement, en hébreu, n’est pas particulièrement modifié en fonction de cette mixité. A l’exception des fêtes religieuses, qui sont toutes expliquées, et autour desquelles tournent bon nombre d’activités. « Chacun doit cultiver son identité, et c’est ici le lieu idéal pour cette multiculturalité », argumente Anat Niv, psychothérapeute impliquée dans le projet.

Pour Margerit et Zakya, cette ouverture est un moyen de donner plus de chances à leur enfant. Même si la coexistence est loin d’aller de soin. « Au moment de la guerre de Gaza, mon fils a été dire ‘Merde aux Arabes’ au fils de Zakya », témoigne Margerit. « Il répétait juste ce qu’il entendait », ajoute-t-elle. La guerre a assurément éprouvé le modèle de mixité du centre. « La guerre a été une opportunité précieuse pour poser des questions, pour s’arrêter sur des formules souvent entendues, pour parler de respect », assure Anat Niv. Selon elle, « la guerre est restée à la télévision, ici les enfants restent amis, ils ne connaissent que la souffrance, mais pas la haine ».

Léore, 12 ans, qui a « de très bon amis arabes » et aime apprendre « quelques » mots d’arabe, réalise être « un peu différente des autres ». « Mais », rétorque-t-elle aussitôt, « si tout le monde pensait comme nous, ça irait sans doute mieux ».

Le débat sur la nature juive de l’Etat d’Israël, récemment mis sur le devant de la scène par le Premier ministre Benyamin Netanyahou, y prend une tournure forcément plus prosaïque. Sarit Peckerman refuse d’entrer dans le fond du débat : « Israël est un Etat très compliqué ; je ne regarde pas les choses dans la globalité, mais plutôt sur ce que je vois ici », explique-t-elle. « Tout cela n’a aucun sens pour les enfants ici ; c’est en jouant au basket par exemple que se créent des affinités, avec des Juifs comme des Arabes ».

Antony Drugeon, le 17 mai 2009

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