Les négociations entre « Occidentaux » et Iraniens sur le programme nucléaire de Téhéran vont reprendre. L’administration américaine se joint pour la première fois aux pourparlers du « G5+1 » (les 5 membres du Conseil de Sécurité plus l’Allemagne) et renonce au préalable de la fin de l’enrichissement de l’uranium. Le président Barack Obama remplit ainsi sa promesse de campagne d’ouvrir des discussions sans condition avec l’Iran, tournant la page de la stratégie du président George W. Bush.
L’Iran a répondu positivement à l’invitation des « Occidentaux ». « La République islamique d’Iran accueille favorablement les discussions avec le groupe des Six en vue d’une coopération constructive », a indiqué lundi 13 avril le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale, chargé notamment de la question nucléaire.
L’Europe, en première ligne dans ces efforts diplomatiques, avait transmis le 8 avril, à la demande des autres membres du groupe 5+1 (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Allemagne), une invitation à l’Iran pour une rencontre directe axée sur son programme nucléaire.
Rompant avec la position de l’administration précédente, le président américain Barack Obama pourrait prendre part directement à ces pourparlers. C’est ce qu’a indiqué la Maison Blanche la semaine dernière. Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a répondu mardi 7 avril être disposé à se joindre à des discussions avec les Etats-Unis sur le nucléaire iranien.
La reprise de ces cycles de négociations – dont la date demeure incertaine – est rendue possible par l’assouplissement de la position « occidentale ». Les discussions précédentes avaient échoué sur la demande des six grandes puissances d’arrêt de l’enrichissement d’uranium par l’Iran comme préalable aux discussions.
Les propositions du G5+1, restées secrètes, consisteraient à permettre à l’Iran de poursuivre l’enrichissement d’uranium pendant un certain temps, parallèlement aux négociations et à des inspections des sites nucléaires iraniens.
Le président iranien a d’ailleurs tenu à symboliser son attachement au droit à l’énergie nucléaire de son pays mercredi 8 avril. Le jour même où il laissait entendre par l’un de ses conseillers que l’Iran allait examiner la « proposition constructive » des six grandes puissances, Mahmoud Ahmadinejad a inauguré à Ispahan (centre) la première usine de fabrication de combustible nucléaire et annoncé la mise au point de deux nouveaux types de centrifugeuses plus puissantes destinées à l’enrichissement d’uranium.
Si l’Iran distingue avec force la reprise de ces discussions de tout arrêt d’enrichissement d’uranium, Israël a déjà proposé, via le ministre chargé du développement régional Sylvan Shalom, que les Etats-Unis se fixent « une limite de temps » dans leur dialogue avec le régime iranien, avouant craindre que ces discussions ne soient qu’une perte de temps.
Les craintes d’Israël de voir l’Iran accéder à la technologie nucléaire avaient été répétées par le nouveau Premier Ministre Benyamin Netanyahou lors de la présentation de son gouvernement le 31 mars devant le Parlement israélien : « le plus grand danger pour l’humanité et pour Israël provient de la possibilité d’un régime radical doté de l’arme atomique », avait alors mis en garde le nouveau chef de gouvernement.
Le changement de stratégie américaine face au programme nucléaire iranien a en revanche séduit Mohamed ElBaradei, directeur général de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA).
M. ElBaradei a fustigé la semaine dernière l’approche de l’administration Bush : « C’était ridicule. Ils pensaient que menacer et taper du poing sur la table, envoyer [Dick] Cheney (vice-président alors, NDLR) tel un Dark Vador (personnage maléfique de films de science-fiction, NDLR) stopperait les Iraniens ».
Selon M. ElBaradei, dont l’organisme onusien serait chargé de mener les inspections des sites nucléaires iraniens, affiche sa préférence pour l’ouverture affichée par l’administration Obama. « Il faut concevoir une approche qui prenne en compte la fierté de l’Iran », a-t-il argumenté.
L’Iran est suspecté par les six grandes puissances de vouloir développer la bombe atomique, mais s’en défend. L’AIEA n’est pas parvenue à prouver l’existence d’un programme nucléaire militaire, malgré une enquête minutieuse de six années. Téhéran dispose d’ores et déjà de 5.500 centrifugeuses, lui permettant d’enrichir suffisamment d’uranium pour fabriquer deux bombes par an, selon l’AEIA.
Antony Drugeon, le 14 avril 2009
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