Les critiques parfois acerbes de Nicolas Sarkozy à l’égard d’autres dirigeants tels que José L.R. Zapatero, José Barroso, Barack Obama et Angela Merkel attirent les foudres de la presse internationale sur le président français accusé d’incarner le renouveau de « l’arrogance française ». Suite aux excuses de la socialiste Ségolène Royal quant à ces propos révélés par le quotidien d’opposition Libération, les tensions sont vives entre la majorité d’un côté, le Parti socialiste et Libération.
Un Barack Obama inexpérimenté, un José Luis Zapatero « peut-être pas très intelligent », une Angela Merkel faible, un José Manuel Barroso « totalement absent »… Les dirigeants américains, espagnols, allemands, de la Commission Européenne en ont pris pour leur grade, lors du déjeuner entre le président français et des parlementaires. C’est du moins ce qu’a rapporté le journal français Libération, citant le président d’après les récits des parlementaires présents. Le journal, qui se targue d’être le premier quotidien d’opposition, a dépassé ses espérances, lançant une vaste polémique.
Dans sa discussion avec les parlementaires, le chef de l’Etat français aurait déploré le manque d’expérience de Barack Obama. « Il est élu depuis deux mois et n’a jamais géré un ministère de sa vie », aurait-il déclaré. Jose Luis Zapatero se serait vu reprocher quant à lui de « n’être peut-être pas très intelligent ». Angela Merkel ? « Quand elle s’est rendu compte de l’état de ses banques et de son industrie automobile, elle n’a pas eu d’autre choix que de se rallier à ma position », se serait réjouit le président français. Le président de la Commission Européenne, José Manuel Barroso, aurait été enfin selon le président « totalement absent lors du G20 ».
La presse des pays dont les dirigeants auraient été épinglés par les propos – semi-privés – du locataire de l’Elysée a dégainé contre le « sniper » Sarkozy, selon l’expression du journal britannique The Times, qui analyse dans l’évènement « la fin de la courte lune de miel franco-américaine ». Le New York Times tire une salve sans appel sur Nicolas Sarkozy, titrant « Un repas avec Sarkozy : brochettes de dirigeants au menu ». Le journal de référence américain a dans le viseur les propos de Nicolas Sarkozy sur le nouveau locataire de la Maison Blanche : « Dans le monde de Sarko, le président Obama est faible, inexpérimenté et mal informé sur le changement climatique ». Quant à la chaîne de télévision espagnole ABC, elle se fait le « porte-flingue » de son propre chef de l’exécutif, vilipendant le « complexe de supériorité » du président français.
Les démentis de l’Elysée n’ont pas suffi à « faire taire la poudre ». Dimanche 19 avril, c’est Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, qui vient à la rescousse du président. Le chef de la diplomatie française a confirmé que Nicolas Sarkozy, en ce qui concerne Jose Luis Zapatero, avait bien dit qu’ « il n’était peut-être pas très intelligent ». Pour mieux démonter la polémique. M. Kouchner a expliqué, reprenant d’ailleurs les citations de Libération, que le président français cherchait à parler au second degré, pour vanter l’intelligence de la gauche espagnole. « C’est une façon de dire : « il l’est » (intelligent, NDLR), il a été élu deux fois et il vient de supprimer la publicité à la télévision (comme le président français, NDLR).»
C’est que l’incident, qui aurait pu rester anecdotique, avait pris une tournure politique entre temps. Ségolène Royal, ancienne candidate à l’élection présidentielle, et figure majeure de l’opposition socialiste, avait présenté samedi ses excuses à Jose Luis Zapatero, au nom de la « République du respect ».
La démarche n’a pas manqué d’irriter l’UMP (Union pour un Mouvement Populaire, parti de la majorité, NDLR). Le parti du président s’est mis en branle-bas de combat, tant contre Ségolène Royal (« une spécialiste de la manipulation » ne cherchant qu’ « à faire parler d’elle », selon Xavier Bertrand, secrétaire général de l’UMP) que contre Libération.
« Libération est en train de ressembler de plus en plus à un tract qui, en colportant une fausse information, contribue à abîmer l’image de notre pays », a ainsi dénoncé samedi Frédéric Lefebvre, porte-parole de l’UMP.
La direction du Parti socialiste, embarrassée par l’initiative de Ségolène Royal, est partagée entre soutenir l’ancienne candidate à l’élection présidentielle et se dissocier de sa démarche. Jack Lang, ancien ministre socialiste, a tenu à critiquer l’idée de Ségolène Royal. «C’est démesuré, disproportionné et surtout inadéquat», a-t-il estimé, avant de déclarer, un brin provocateur : « J’ai envie de dire à nos amis espagnols: excusez-la, pardonnez-lui!».
Dernier épisode dans cette singulière polémique, le directeur de Libération, Laurent Joffrin, exige des excuses de la part de l’Elysée.
Antony Drugeon, le 21 avril 2009
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