Espoir teinté de scepticisme à l’occasion de la rencontre Olmert-Abbas à Jérusalem

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Le président palestinien Mahmoud Abbas et le Premier ministre israélien Ehoud Olmert.
Le président palestinien Mahmoud Abbas et le Premier ministre israélien Ehoud Olmert.

Face à leurs opposants internes, les deux dirigeants ont tenté de reprendre la main en relançant le processus de paix.

Ils savent qu’ils jouent gros. En recevant samedi pour la première fois le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, Ehoud Olmert, le Premier Ministre israélien se résout à faire un signe d’ouverture alors qu’il ne parvient plus à imposer son autorité en Israël depuis la guerre du Liban. De son côté, le président palestinien doit montrer à son opinion publique que le processus de paix ne passe que par lui, alors qu’il vient de convoquer des élections anticipées pour reprendre la main face au Hamas. Les deux dirigeants relancent donc le processus politique non sans arrière pensées politiques : la relance du processus de paix interrompu en 2000 dépendra de leur capacité à convaincre auprès de leurs opinions publiques respectives du succès de celui-ci.

Israël sait donc qu’il lui faut faire des concessions pour éviter que le Hamas ne soit réélu au Parlement palestinien. La ministre israélienne des Affaires étrangères, Mme Tzipi Livni, ne cache pas que tel est l’objectif de son gouvernement : « Il faut que le peuple palestinien comprenne qu’il y a deux options : celle qui existe actuellement avec un gouvernement terroriste qui ne peut satisfaire ses besoins quotidiens et politiques, tandis qu’il peut avoir une alternative capable de traiter de leurs besoins quotidiens et leur offre un horizon politique » a-t-elle affirmé à la radio de l’armée israélienne. Le gouvernement israélien a donc profité de l’occasion pour voter à l’unanimité le transfert de 100 millions de dollars au bureau du président palestinien. Ces fonds seront prélevés sur une partie des taxes douanières et de la TVA prélevées par Israël pour le compte de l’Autorité palestinienne sur les produits importés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Ces fonds avaient été gelés au début de l’année en guise de sanctions après la victoire aux élections législatives des islamistes du Hamas et la formation en mars d’un gouvernement sous sa direction. « Il s’agit ainsi d’équilibrer l’aide financière accordée par l’Iran au Hamas », a déclaré le vice-premier ministre Shimon Pérès à la radio publique.

Reste l’épineuse question des prisonniers. Ehoud Olmert ne pouvant apparaître trop conciliant alors que la droite dure reprend de la vigueur en Israël, la rencontre de samedi n’a abouti à aucun accord sur la libération des prisonniers palestiniens et du soldat Gilad Shalit enlevé. Mais les deux parties ont convenu de réactiver une commission mixte chargée de déterminer la liste des personnes à libérer. M. Miri Eisen, porte-parole de M. Olmert, a souligné qu’Israël est prêt à libérer un grand nombre de prisonniers palestiniens, mais « il n’y aura pas de libération de prisonniers avant le retour de Gilad Shalit ». Un signe de fermeté pour que les faucons en Israël ne récupèrent pas les fruits politiques de ces accords. Déjà, la droite israélienne y réagit avec hostilité : le député du Likoud (opposition de droite) Sylvan Shalom a dénoncé la remise des taxes douanières et de la TVA à l’Autorité palestinienne en estimant qu’Israël « va encourager la Communauté internationale notamment les Européens à briser l’embargo financier imposé à l’Autorité palestinienne ». Du côté palestinien, le ministre chargé des prisonniers, Wasfi Kabha (Hamas), a estimé que « cette rencontre n’était que de la poudre aux yeux ». « Aussi bien Abou Mazen (Mahmoud Abbas) qu’Ehoud Olmert sont confrontés à une crise interne et ils se sont rencontrés uniquement pour dire qu’ils espèrent reprendre des négociations », a critiqué ce ministre.

Antony Drugeon, LIBERATION, le 25 décembre 2006

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